Cet homme est dangereux
C'est le titre de l'éditorial de Béatrice Delvaux dans Le Soir de Bruxelles, paru le 30 avril.
Sans commentaires !
"Nicolas Sarkozy ne court plus derrière le Front national. Ce dimanche, il l’a rattrapé. Le président candidat n’avait plus hier pour ses militants qu’un projet et une obsession : pas la croissance, pas la dette mais la Nation, l’identité, la frontière.
Mais pourquoi cet homme s’est-il tant battu pour la survie de l’Europe dès lors que les paroles scandées ce dimanche en torpillent l’essence ? Il faut réentendre et relire les phrases prononcées : « Je veux faire de la France une nouvelle frontière future de la civilisation du XXIe siècle », « Les pays qui gagnent sont ceux qui croient dans l’esprit national », « L’Europe a trop laissé s’affaiblir la Nation », « Je n’accepterai pas qu’il n’y ait plus aucune différence entre être français et ne pas l’être ». Il n’y a sans doute pas là de quoi arracher la victoire mais la manière dont il aura banalisé, exalté ces paroles, aura contaminé les esprits, quoi qu’il se passe le 6 mai. Jouer le nationalisme à l’extrême est un danger total, car on sait comment réveiller l’instinct identitaire mais rarement comment le maîtriser, le faire rentrer dans sa boîte et l’empêcher de virer à l’obsession raciste. Certains estiment François Hollande dangereux pour l’économie européenne et les marchés financiers. Mais c’est un amateur face à ce président candidat qui ose tout pour gagner.
Il n’est pas question ici de nier que la multiculturalité et l’intégration sont des enjeux majeurs pour la France et l’Europe de demain. Mais il y a une certitude : ce n’est pas avec cette ode triomphante à la Nation et à l’identité sous-entendue « pure » qu’on va apporter des solutions. Et il va en faire quoi, s’il est réélu le président Sarkozy, de son discours antieuropéen et identitaire ? Aller au bout de sa nouvelle logique ? Cela fait froid dans le dos.
Mais le pire dans cette histoire est que l’homme n’en pense pas un mot, de ce discours. Sarkozy depuis toujours, ne se sert des thèmes que parce qu’ils peuvent le servir, lui. Cet homme au service de son ambition, sorte de girouette sans tête, est en train de détruire l’esprit citoyen, de nourrir le racisme, d’exalter les instincts de haine. Dans sa tentative désespérée de quand même emporter cette couronne, il brûle tout sur son passage. Et ne s’en rend même pas compte."