Mai 68

Publié le par JGC

Vu hier à la télé N.B. (Nicolo Berlusckozi – je ne l’appellerai plus que comme ça !) éructer devant une foule en délire réunissant quelques grands intellectuels français parmi lesquels : Rika Zaraï, l’humoriste raffiné Bigard et quelques autres... J’avais entendu, il y a plusieurs mois, ses interventions au Kärcher contre la «racaille», et croyais comprendre la blessure des jeunes de ces quartiers ainsi désignés. Mais non !
Je n’avais pas compris, je veux dire rien ressenti véritablement de ces injures, n’étant pas moi-même dans cette situation.
Il en va tout autrement aujourd’hui, après la charge inouïe contre « Mai 68 et ses héritiers » qui fut prononcée hier. Blessé, profondément blessé, autant que les mômes du 93.

Ainsi donc, nous serions, je serais, (je n’y peux rien, j’avais 20 ans en 68 !) responsables de tous les maux de la terre, y compris de la dérive morale, de l’abandon du travail, des parachutes en or, des échecs de l’école… Nous ne croyons en rien, même pas en nous-mêmes. J’en passe!
A vrai dire, ce tissu caricatural d’inepties et de mensonges, autant que la violence avec lesquels ils sont proférés, me laissent muet ! Glacé !
Mes parents m’avaient parlé du populisme et de la montée de la droite et de l’extrême droite dans les années 30. J’avais vu des images, diverses, des grands meetings fascistes de l’époque que je croyais, naïvement, révolue. Mais non ! Tout cela est présent, en germe, arrosé avec persévérance par une droite extrême qui se tourne désormais vers le « chef » providentiel.  Et tous ces députés centristes qui vont à la soupe ! Gare !

Ainsi, la crise du pétrole en 74… mai 68 !
Le chômage de masse… mai 68 !
L’urbanisme débridé de nos banlieues... mai 68 !
Les télévisions privées aux ordres de Coca Cola… mai 68 !
La Sida… mai 68 !
Les problèmes conjugaux (du ministre ?)… mai 68 !
L’interminable conflit du Moyen-Orient… mai 68 !
La dette du pays… mai 68 !
L’Europe défaillante… mai 68 !
Les tours qui s’effondrent à New-York… mai 68 !
Le capitalisme financier international… mai 68 !
Les délocalisations… mai 68 !
La misère en Afrique… mai 68 !
La chute du mur de Berlin… mai 68 !
La fin de la guerre froide et les déséquilibres du monde… mai 68 !
Le terrorisme, les guerres, les épidémies, la grippe aviaire, les spams, les textos, les nouvelles technologies… mai 68 !
Et les ratons laveurs ?

Bref, tout ce qui fonde les difficultés du moment serait imputable à une génération entière !

Je me souviens pourtant d’une explosion de luttes sociales, d’usines et de facultés en grèves, d’un peuple comme jamais solidaire, de dialogues inouïs aux coins des rues, de nuits passées avec les travailleurs de Renault Billancourt, d’un rêve de justice et de bonheur partagé par une grande part de la jeunesse du monde… et, très vite, la « ruée vers l’ordre », les élections, la peur, et la majorité absolue de la droite au pouvoir…

Je me souviens des progrès sociaux, de l’avortement, de la contraception, de la peine de mort abolie, des radios libres, de la majorité à 18 ans, du développement culturel, de la fin de la guerre du Vietnam… rien de cela n’aurait été réalisé sans mai 68. Et que dire de l’unanimisme aujourd’hui proclamé sur la nécessité d’une éducation artistique généralisée, thème et combat totalement immergés dans « l’esprit de 68 », qui fut aussi celui de 36, de l’éducation populaire, de l’éducation active…

Bref, « mai 68 » fut un moment de l’histoire sociale, culturelle et politique que personne, même Berluskozy, n’arrivera à « kärcheriser ».

Aller, juste pour le plaisir, avant qu’ils ne soient définitivement interdits à la diffusion (je rassure les plus jeunes, personne ne confondait ces slogans poétiques avec une quelconque réalité…) quelques phrases de l’époque :

* Il est interdit d'interdire.
* L'imagination prend le pouvoir !
* À bas la société spectaculaire marchande.
* Je prends mes désirs pour des réalités car je crois en la réalité de mes désirs.
* Vivre sans temps mort et jouir sans entrave.
* L'ennui est contre-révolutionnaire.
* Nous ne voulons pas d'un monde où la certitude de ne pas mourir de faim s'échange contre le risque de mourir d'ennui
* Plébiscite : qu'on dise oui qu'on dise non, il fait de nous des cons.
* Ne négociez pas avec les patrons. Abolissez-les.
* Le patron a besoin de toi, tu n'as pas besoin de lui.
* Veuillez laisser le Parti communiste aussi net en sortant que vous voudriez le trouver en y entrant.
* Je suis marxiste tendance Groucho.
* Soyez réalistes, demandez l'impossible.
* On achète ton bonheur. Vole-le.
* Sous les pavés, la plage
* Imagine : c'est la guerre et personne n'y va !
* Laissez la peur du rouge aux bêtes à cornes.
* Les murs ont la parole.
* Élections, piège à cons.
* Prenez vos désirs pour la réalité.
* Cours camarade, le vieux monde est derrière toi.

Demain, 1er mai. Je vous en offre un brin !











* Ce n’est qu’un début, continuons le combat !



Et pour s'amuser un peu, à découper :

Publié dans COUPS DE GUEULE

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E
Jean-Gabriel : Bravo<br /> En 68 aussi, je suis allé à Charlety et il y avait Pierre Mendès-France.<br /> Bon 1er mai<br />  <br />  
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J
BRAVO, Philippe Meirieu a aussi réagi à cette charge malade de BERLUSCONARD, marre de "Chargekozy" sur tout ce qui invente, tout ce qui rend moins bête et moins pétri de certitudes rétrogrades.<br /> Et pareil pour l'Université, pour la pensée, pour la Littérature... On n'a pas fini si le 6 Mai une majorité se rallie à pareille bouillie idéologique.<br /> Et le pire, c'est qu'il le dit en pensant se rendre sympathique dans les banquets arrosés de la France profonde. Cet homme parle peuple, c'est bien là le véritable DANGER.<br /> Espérons que ROYAL endigue cette fureur anti-intellectuelle.<br /> <br /> JCL
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