Comment meurt une compagnie ?
Dans un texte sobrement intitulé Lettre aux amis, aux spectateurs, aux professionnels, aux experts, aux tutelles.. Jean-Marc Bourg tente d’élucider les raisons qui l’ont conduit à mettre un terme aux activités de sa compagnie (Labyrinthes en Languedoc-Roussillon).
Une sorte d'état des lieux de la création théâtrale en France, mère des arts.
Au mois de septembre, j’ai décidé de mettre un terme aux activités de la compagnieLabyrinthes. En période de création alors, j’ai tenu cette décision secrète pendantquelques semaines, n’en informant que nos principaux partenaires : le Théâtre d’O à Montpellier et le Conseiller pour le Théâtre de la DRAC Languedoc-Roussillon.
Puis la nouvelle a circulé, de manière informelle ; je ne pense pas qu’aujourd’hui beaucoup de monde l’ignore ; mais il me reste à l’expliquer ; je le dois à beaucoup d’entre vous.
Diriger une compagnie signifie la plupart du temps construire sa vie autour d’un outil par soi-même forgé, faire de sa vie et de cet outil en quelque sorte une seule et même chose. Ranger cet outil n’est donc pas une décision légère à prendre. J’aimerais que ni l’idée d’une saute d’humeur, ni celle d’un passage dépressif, ne constituent uneexplication suffisante pour personne.
Fermer Labyrinthes représente, objectivement, un échec. Mais échec de quoi ? de qui ? Il faut, si l’on pense que cela peut avoir un intérêt, pour soi, pour d’autres, creuser, fouiller dans la mémoire, comprendre ce qu’on a fait, bien ou mal. Ce que les autres ont fait, ou pas.
Je ne suis pas sûr de parvenir en quelques lignes à tout dire des raisons qui me poussent, encore moins à bien les dire. Depuis près de trois mois que ma décision est prise, il m’a fallu du temps pour la comprendre, la formuler, et d’abord à moi-même. Les raisons se sont succédées, parfois contradictoires ; j’ai tenté de ne pas accuser le monde entier de tous les maux ; j’ai surtout au bout du compte par les raisons que je me donnais, voulu me donner le maximum de chance de me tourner vers ce qui adviendra demain, sachant pertinemment que l’abandon de la compagnie signifie d’abord et avant tout le risque de perdre très rapidement le seul métier que je sache faire.
Ci dessous :