Le ministre de sa culture
Près de deux ans après son intronisation, le Président de la République s’intéresse (enfin) à la culture. Vœux au monde de la culture à Nîmes, installation d’un «Conseil de la création artistique», dirigé par Marin Karmitz, qu’il présidera lui-même. Faut-il en s’en réjouir… ou s’en plaindre ? Au fond, il était légitime de se plaindre du peu d’intérêt manifesté par le chef de l’Etat pour un domaine qu’il ne fréquente guère. Il est plus légitime encore de s’effrayer désormais du fait qu’il s’en occupe! Il est des périodes durant lesquelles la discrétion est un moindre mal. « Oubliez-nous », avait-on envie de lui dire ! Mais non ! Placée comme élément majeur du développement économique, la question culturelle risque aujourd’hui d’être broyée dans la grande machine à communication et à résultats que l’on nous impose dans tous les domaine. Gare ! Il fallait entendre le discours d’introduction au Conseil de la création artistique, texte manifestement découvert par le lecteur au moment même de sa lecture. Ainsi donc, il conviendrait de mettre un « coup de pied dans la fourmilière » et seul le Président en personne serait libre de le faire, puisque tous les autres – militants, responsables culturels, artistes, médiateurs…- sont inévitablement muselés par leur dépendance à la subvention publique ! Quel mépris ! A la poubelle, donc, toutes les réflexions sérieuses sur les politiques culturelles, dont « les rapports s’alignent sur les étagères du ministère»… A la poubelle, cinquante année de travail, d’engagement, de créations… A la poubelle, les projets des collectivités territoriales qui développent sur le terrain des actions innovantes… A la poubelle, par exemple, les Assises de la culture menées récemment à Toulouse, et toutes les propositions élaborées avec les acteurs de terrain. Et vive « l’enseignement artistique », solution miracle à tous nos maux, que les ministres s’empressent de traduire en enseignement de «l’histoire des arts », trahison totale des toutes les expériences pratiques menées depuis des décennies. Tout cela sera désormais rénové grâce aux lumières d’un petit groupe auto-désigné «conseil ». Attention, route glissante ! En vérité, le champ culturel doit s’inquiéter de l’intérêt soudain qu’il suscite plus encore que de l’ignorance dans lequel il se trouvait jusque-là. Le monde politique a longtemps confondu culture et communication, multipliant les événements de toute nature pour espérer un « retour d’image ». Il s’engage aujourd’hui sur le chemin économique de la « sortie de crise » par la création artistique. Ces deux voies sont des impasses. Le réveil risque d’être brutal.
Entendons-nous : bien des choses sont à changer dans l’action et les politiques culturelles, mais elles n’ont rien à voir avec la méthode et les orientations proposées par notre Grand Timonier devenu soudain « ministre de sa culture ! » Il peut être utile de relire aujourd’hui la « lettre de mission» rédigée lors de son élection, et les modifications proposées alors dans la « contre-lettre» que nous avions initié avec quelques amis. Au fait, il m’en reste quelques unes. Je m’en vais les adresser aux membres du-dit « Conseil de la création artistique », dès que l’adresse sera connue. Je vous raconterai la suite… si suite il y a !
Entendons-nous : bien des choses sont à changer dans l’action et les politiques culturelles, mais elles n’ont rien à voir avec la méthode et les orientations proposées par notre Grand Timonier devenu soudain « ministre de sa culture ! » Il peut être utile de relire aujourd’hui la « lettre de mission» rédigée lors de son élection, et les modifications proposées alors dans la « contre-lettre» que nous avions initié avec quelques amis. Au fait, il m’en reste quelques unes. Je m’en vais les adresser aux membres du-dit « Conseil de la création artistique », dès que l’adresse sera connue. Je vous raconterai la suite… si suite il y a !
PS : Deux mots pour signaler notre découverte récente d’un artiste exceptionnel dont nous avions entendu parler lors de notre récent séjour au Québec. Retenez son nom : Fred Pellerin, conteur québécois de la trempe de Dario Fo, créateur de langage et d’imaginaire formidables. Il reviendra l’année prochaine au Théâtre du Rond-Point. Ne le ratez pas ! J’essaierai de vous en reparler à l’occasion.
PS2 : Je n’ai aucune tendresse particulière pour le travail médiatique et artistique du dénommé « Arthur ». Mais voilà, ce garçon s’est lancé dans le spectacle, et ses spectacles sont perturbés par de basses attaques antisémites. Il a écrit un texte touchant dans le Monde, qui mérite d’être lu. C’est ici.
PS3 : Avez-vous remarqué le gros mensonge proféré par notre Grand Timonier lors de son émission de télévision, à propos de la nomination du Président des chaînes publiques ? Confirmation ici. On se demande comment des journalistes professionnels peuvent laisser passer cela sans répliquer !
PS4 : Pour rire un peu… Entendu sur Canal + : « il paraît qu’ils ont remis la pub sur le service public. Sarkozy y était pendant plus d’une heure la semaine dernière ! »